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Les principes de Corporate Governance dictés par les Etats-Unis vont-ils faire la loi ?


Article

L'Expert-comptable suisse - Avril 2003

Forum

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Article d'Olivier Terrettaz dans L'Expert-comptable suisse d'avril 2003

La théorie du Corporate Governance analyse la structure du pouvoir au sein des sociétés, pour en dégager les inconvénients actuels et proposer des solutions, afin d’aboutir à une gestion optimale des entreprises et de rééquilibrer les pouvoirs.

Le Sarbanes-Oxley Act tente d’y remédier et, par ses dispositions, la loi américaine impose des règles contraignantes à toutes les sociétés cotées sur le marché américain.

 

La question actuelle :

« Les principes de Corporate Governance dictés par les Etats-Unis

vont-ils faire la loi ? »

 

Le Sarbanes-Oxley Act est applicable non seulement aux entreprises américaines mais également aux sociétés étrangères et à leurs auditeurs, ainsi qu’aux filiales suisses de sociétés mères enregistrées à la SEC !

 

… et la réponse spontanée :

« Les réglementations américaines (loi fédérale et règles boursières) auront des répercussions au niveau mondial ! »

 

Voici le commentaire d’Olivier Terrettaz

Economiste d’entreprise HES, Conseiller

et expert en gouvernement d’entreprise, Genève

A la lumière de l’évolution récente des différentes dispositions prises par certains pays, la législation américaine innove. Avant cette loi, les Etats-Unis préféraient une liberté donnée aux acteurs du marché plutôt que de légiférer, raison pour laquelle ce sont des fonds de pension comme CalPERS et TIAA-CREF qui donnaient la mesure. L’innovation de la loi réside dans le fait que les entreprises étrangères cotées sur les bourses américaines sont obligées de mettre en application le Sarbanes-Oxley Act.

Ne peut-on donc pas considérer que c’est de l’ingérence pure et simple dans les législations nationales des autres pays ?

Certes, les dispositions de la loi américaine sont nombreuses à se conformer par analogie à diverses dispositions d’autres nations, mais la convergence que l’on pourrait supposer est infidèle.

Cela ne va pas sans poser de graves conflits potentiels. Pour la Suisse, le simple fait de devoir remettre des notes de révisions au Public Company Acounting Oversight Board (PCAOB) entraînent des conflits avec les lois suisses telles que le code pénal (art. 162, 271, 273 et 321), la loi fédérale sur la protection des données, la loi fédérale sur les bourses et les négociants en valeurs mobilières, etc. Ces conflits existent car le Sarbanes-Oxley Act va beaucoup plus loin que la plupart des dispositions adoptées par d’autres pays et en particulier en Europe, mais aussi parce que, dans certains cas, notamment dans la transmission d’informations par les réviseurs au PCAOB par exemple, il y a violation du secret professionnel. On retrouve, en matière de Corporate Governance, la profonde divergence de philosophie entre l’Europe et les Etats-Unis, que l’on peut observer dans de nombreux domaines d’ailleurs. Afin d’illustrer cela, considérons très succinctement trois approches; celle des Anglo-saxons, des Germaniques et des Français.

L’approche anglo-saxonne, pragmatique et libérale en matière d’économie, consiste à laisser les entreprises réguler leur organisation en établissant des règles professionnelles, à l’exception récente bien entendu du Sarbanes-Oxley Act, alors que l'approche allemande, beaucoup plus dogmatiques, ont sorti une batterie de lois afin de définir très précisément ce que le législateur attend des entreprises. L’approche française est particulière. On peut la définir comme à son habitude de franco-française. Elle consacre un fait qui est l’exercice solitaire du pouvoir. La France sacralise le Président-Directeur Général (PDG) qui, de par la loi, détient le pouvoir absolu. Le Corporate Governance à la française n’est autre qu’une mauvaise contrefaçon de l’original anglo-saxon. Ainsi jugées, les différentes approches nous montrent que le modèle français est inacceptable et qu’une fois encore les Anglo-saxons tiennent à être efficaces, raison pour laquelle ils ont influencé de manière significative la mise en place de principes de Corporate Governance dans les autres pays. Mais le pouvoir que confère ce modèle aux fonds de pension est dangereux et doit être modéré. Cependant, le débat reste le plus souvent dominé par des concepts importés des Anglo-saxons, faute le plus souvent d’un manque de réflexion appropriée sur les différences qui existent en Europe et qui motiveraient le cas échéant d’autres approches.

Pour revenir à la loi américaine, les divergences d’interprétation de celle-ci résident dans son champ d’application qui assujettit des entreprises en dehors des Etats-Unis. Cette loi est incompatible avec des lois nationales, telles qu’en Suisse par exemple. Le casse-tête juridique subsiste donc. Toutefois, ce ne sera certainement pas une loi américaine, puisque tant l’Union européenne que la Suisse émettent de sérieux doutes quant à l’effet d’extraterritorialité qu’elle déploierait, qui va nous dicter nos choix quant au Corporate Governance à appliquer dans nos entreprises et nous obliger à nous doter d’un arsenal législatif plus important ! Dans ce cadre, la Confédération doit jouer un rôle de tout premier plan et défendre le principe de l’équivalence, en proposant par exemple aux Américains une autorité de surveillance helvétique qui serait reconnue par eux. Mais il faut avoir à l’esprit que toute densification législative, surtout motivée par des considérations politiques, ne peut aboutir qu’à une inefficacité et à des coûts plus élevés et cela n’est tout simplement pas acceptable...

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